"Au bonheur des dames?"
Voilà un sous-titre qui a de quoi intriguer. Bien sûr, il s'agit d'une référence au célèbre roman d’Émile Zola, traitant du développement des Grands Magasins parisiens dans les années 1860, mais les visiteurs de l'exposition ont-ils tous fait ce rapprochement, et surtout, dans quel sens prendre cette allusion? Comme un simple parallèle avec l'essor similaire que connurent à leur tour certaines entreprises commerciales japonaises au début du 20ème siècle? Ou bien avec une pointe d'ironie, loin de la beauté frivole des articles vendus à une clientèle plutôt aisée, considérant tout ce que cette évolution a entraîné comme conséquences souvent humainement assez dramatiques (fermeture des petits commerces, précarité de l'emploi, etc)?
Quoiqu'il en soit, ce choix inscrit d'emblée l'exposition dans une perspective moderne et une vision très occidentale (d'où la dernière partie consacrée aux créations de haute couture inspirées du kimono, du japonisme à nos jours), un peu au détriment de l'historique de la maison
Matsuzakaya (fondée en 1611 à Nagoya) ainsi que de ses riches collections. D'ailleurs, l'affiche elle-même s'en ressent: mannequin de type européen tout droit sorti d'un magasine de mode vêtu d'un modèle contemporain certes intéressant d'un point de vue du design, mais sans aucune comparaison possible avec la délicatesse et le raffinement des précieux kosode des 17, 18 et 19ème siècles présentés pour la première fois en France. Pourtant, lorsqu'on les a contemplés, on sait combien ces derniers recelaient matière à réaliser un visuel des plus somptueux! Un potentiel hélas mis complètement de côté, sans doute dans le souci de renouveler l'intérêt pour le
musée Guimet auprès d'un public plus "large", donc globalement moins sensible à ce genre de subtilités...
Ceci étant, l'ensemble se déroulait sous nos yeux suivant une scénographie classique et efficace, des catalogues de motifs aux kimonos en passant par les objets associés au port du costume traditionnel: des obi (ceintures), accessoires de coiffure tels que kushi (peignes) et kanzashi (pics), jusqu'au trousseau de la mariée japonaise. Seul le haori, veste portée par-dessus le kimono, n'était pas représenté, alors même qu'il en épouse la forme (en plus court) et qu'il a inspiré lui aussi nombre de créateurs! On reste malgré tout sous le charme des broderies et teintures si poétiques de ces habits anciens aux motifs végétaux, animaliers ou abstraits, pour la plupart réalisés dans des étoffes de soie des plus nobles...
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